Tendances chiffrées de Paris-Brest-Paris

A la veille de la vingtième édition, l’ACP vous propose d’analyser les tendances de Paris-Brest-Paris à travers trois indicateurs mesurés sur les 46704 inscriptions qui ont été enregistrées depuis 1931 et qui constituent notre base de données. Ce sont la part des Français, la part des femmes et enfin l’âge moyen.

Mondialisation de Paris-Brest-Paris

Evénement franco-français pendant les sept premières éditions, Paris-Brest-Paris s’est internationalisé, d’abord lentement avec les Belges, les Néerlandais et les Britanniques, puis avec les Scandinaves et les Américains, et aujourd’hui sur tous les continents avec plus de 70 nationalités différentes.

Les chiffres sont les suivants :

Le basculement faisant de PBP une épreuve ouverte à de nombreux pays date de 1983. C’est le fruit de la création en 1976 des Brevets Randonneurs Européens par Robert Lepertel. Ils deviendront Mondiaux à la suite de ce Paris-Brest et l’internationalisation de la quadriennale ne cessera de grandir. Les Français seront minoritaires dès 2003 et ne sont plus à présent qu’un petit quart des inscrits.

La tendance est franche et linéaire de 1987 à aujourd’hui. Elle continuera en 2023 avec l’ouverture de PBP à de nouveaux pays. Il est toutefois probable qu’elle se ralentisse un peu, d’abord car au rythme actuel la part des Français serait vite proche de zéro, ensuite parce que l’ACP a décidé de réserver un quota de places aux seuls Français, pour que tous ceux qui souhaitent s’inscrire aient satisfaction malgré la flambée des effectifs. Reste à espérer que ces 2500 places trouvent preneur en 2023.

Féminisation de Paris-Brest-Paris

Que dire des chiffres qui expriment la part des femmes dans les inscrits à Paris-Brest-Paris lors des 19 éditions, qui soit autre que de constater à quel point elle reste faible, pour ne pas dire très faible.

Le premier constat est que leur part n’a jamais retrouvé le niveau de l’édition initiale, celle de 1931, où elles étaient 6 sur 64 inscrits. Une explication est évidente pour qui connaît l’histoire de la bicyclette. La lente chute du taux de féminisation, de 1931 jusqu’aux années 60, est due à la diminution progressive de l’engouement pour les tandems et par suite à l’arrêt de leur fabrication. En effet la plupart des femmes de ces années-là étaient inscrites en machine double avec leur époux, à quelques exceptions près, comme Jeanne Masson ou Paulette Vassard. Mais pourquoi la machine reine des premiers congés payés a-t-elle si mal survécu à l’arrivée sur le marché des engins à moteur, encore plus mal que la bicyclette ? La parole aux sociologues…
Après le creux de 1966 à 1,60%, on constate une remontée légère avec un premier palier vers 3% dans les années 70, puis un deuxième palier vers 6%, de 1987 à 2015. Le chiffre de 2019 à 8% est-il le début d’un troisième palier ou l’amorce d’une remontée plus franche vers la parité ? La deuxième hypothèse semble plus probable, si l’on en juge par les chiffres des premiers BRM pré-qualificatifs, mais ça demande confirmation.

Âge des inscrits à Paris-Brest-Paris 

Une image classique est de souvent voir les anciens combattants comme des personnes âgées. Il faut faire un effort pour imaginer qu’au moment des combats ils étaient jeunes, et parfois beaucoup plus jeunes que les combattants d’aujourd’hui. C’est exactement le cas des participants à Paris-Brest-Paris.
L’ACP possède à présent les dates de naissance de 98,5% des inscrits aux 19 éditions de Paris-Brest-Paris, donc de 1931 à 2019. Dès lors il est possible de faire une statistique toute simple, consistant à observer comment a évolué leur âge moyen.
Les chiffres sont les suivants :

Mettons à part l’année de création 1931, où la jeunesse a été seule tentée par la nouveauté du défi. Bien sûr aucun récidiviste, et jamais plus PBP ne retrouvera une telle jeunesse. Ensuite il est probable que ceux de 1948, qui seraient partis en 1941 si PBP avait eu lieu, auraient eu une trentaine d’années plutôt que 37.

La suite est étonnamment stable jusqu’en 1979 avec un âge moyen de 37 ans.  Le léger vieillissement de + 2 ans, en 1983 et après, a une explication simple : la convention FFC/FFCT interdisant que soient organisées des courses sous l’égide de la FFCT, donc fermant surtout la porte aux jeunes, du moins les poussant à ouvrir celle des cyclosportives de création récente. Officiellement PBP n’était pas une course, mais ceux qui ont bien connu cette époque avoueront que ça y ressemblait quand même.

Ensuite les participants vieillissent avec un réservoir de sang neuf qui s’appauvrit, et l’âge moyen augmente presque linéairement, d’édition en édition, pour atteindre 50 ans en 2011. Et là, l’arrivée de nouveaux participants, étrangers le plus souvent, stoppe cette lente dégradation qui se stabilise sur une valeur de 50 ans depuis les trois dernières éditions.

La courbe va-t-elle en 2023 s’infléchir pour revenir lentement aux valeurs antérieures ? Difficile à affirmer, mais plusieurs éléments vont dans ce sens : le retrait des derniers vieux Français, l’arrivée massive de jeunes étrangers, l’ouverture de PBP à d’autres fédérations dont les triathlètes, et peut-être enfin l’arrivée de jeunes Français et Françaises, souvent non encartés.

Il n’en demeure pas moins que l’âge moyen global de 47 ans est anormalement élevé pour une épreuve sportive de la difficulté de Paris-Brest-Paris. Il reste, d’ici 2031 qui sera l’année du centenaire de Paris-Brest-Paris Randonneur, trois éditions pour le ramener à une valeur qui ne soit plus celle où l’on devient vétéran.

Conclusion

La vingtième édition apportera sans doute son lot de surprises. Verrons-nous se confirmer la hausse des inscriptions féminines qui pourraient enfin atteindre 10%, soit 800 nanas ? Verrons-nous s’arrêter la chute des inscriptions françaises et une remontée vers 30%, si les 2500 places réservées aux Français sur les 8000, étaient comblées ? Enfin l’âge moyen, qui ne peut monter éternellement, confirmera-t-il le palier actuel de 50 ans ou entamera-t-il une décrue ?

Rendez-vous dans quelques mois pour connaître les réponses.

Alain COLLONGUES